Dans cette décision publiée au recueil Lebon, le Conseil d’Etat est venu préciser les modalités de cristallisation des moyens produits devant le juge administratif prévue par l’article R.600-5 du Code de l’urbanisme pour les recours dirigés contre les autorisations d’occupation des sols en ce qui concerne le cas spécifique des permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale au sens de l’article L.752-17 du Code de commerce.
Pour rappel, la cristallisation des moyens, posée pour la première fois par le Conseil d’Etat en 1953 dans un arrêt Intercopie, consiste en l’impossibilité pour chaque partie de soulever de nouveaux moyens dans une des deux différentes sources juridiques distinctes : la légalité externe (vices de procédure, de compétence ou forme) et la légalité interne (relative au contenu de l’acte en lui-même).
Il était en l’espèce question dans cette instance de la contestation d’un tel permis octroyé par la Commune de Nice pour un centre commercial comprenant notamment un supermaché « Super U », dans un secteur où se situait d’ores-et-déjà un supermarché Casino.
Déboutée en première instance puis en appel, la requérante s’était pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat, estimant que la Cour administrative d’appel ne pouvait pas rejeter comme irrecevable les moyens produits au-delà du délai imparti par l’article R.600-5 du Code de l’urbanisme car elle ne contestait non pas l’octroi du permis de construire en lui-même mais l’autorisation d’exploitation commerciale qu’il comprenait.
Mais le Conseil d’Etat a balayé ce moyen, soulignant :
- d’une part que l’article L. 600-13 du code de l’urbanisme prévoit que : « Les dispositions du présent livre sont applicables aux recours pour excès de pouvoir formés contre les permis de construire qui tiennent lieu d’autorisation au titre d’une autre législation, sauf disposition contraire de cette dernière. »
- Et, surtout, d’autre part que l’article R.600-5 concernait « toute décision d’occupation ou d’utilisation du sol ».
En second lieu, le Conseil d’Etat estime que « la seule circonstance que l’étude des flux de circulation fournie par le pétitionnaire n’ait pas envisagé les flux pendant la période estivale » n’a pas vicié l’avis rendu par la commission nationale d’aménagement commercial et donc que l’arrêt est suffisamment motivé.
Ainsi, les juges du Palais Royal confirment la décision d’appel, affirmant bien que même la simple contestation de la dimension d’autorisation d’exploitation commerciale d’un tel permis faisait l’objet du délai de cristallisation des moyens.