Conseil d’Etat, 7e et 2e chambres réunies, 8 mars 2023, SIPPEREC, n°464619
Dans une décision du 13 juin 2022, Centre hospitalier d’Ajaccio, n° 4533769, le Conseil d’Etat avait affirmé qu’une personne publique est tenue de solliciter le juge pour obtenir l’annulation d’une clause d’un contrat, même si cette dernière est illicite. Ainsi, il estimait qu’il n’était pas possible de faire disparaitre rétroactivement une clause même illicite, dès lors qu’elle a été convenue par les parties au contrat.
Par cette décision SIPPEREC du 8 mars 2023, le Conseil d’Etat est venu quelque peu rectifier le tir en rappelant qu’« en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, la personne publique contractante peut unilatéralement apporter des modifications à un tel contrat dans l’intérêt général, son cocontractant étant tenu de respecter les obligations qui lui incombent en vertu du contrat ainsi modifié tout en ayant droit au maintien de l’équilibre financier du contrat. »
Les juges du Palais Royal en déduisent dès lors que « La personne publique peut ainsi, lorsqu’une clause du contrat est affectée d’une irrégularité tenant au caractère illicite de son contenu et à condition qu’elle soit divisible du reste du contrat, y apporter de manière unilatérale les modifications permettant de remédier à cette irrégularité. »
Il reste néanmoins à éclaircir le cas problématique des clauses indivisibles du contrat, le Conseil d’Etat ne manque pas d’y répondre en affirmant que « si la clause n’est pas divisible du reste du contrat et que l’irrégularité qui entache le contrat est d’une gravité telle que, s’il était saisi, le juge du contrat pourrait en prononcer l’annulation ou la résiliation, la personne publique peut, sous réserve de l’exigence de loyauté des relations contractuelles, résilier unilatéralement le contrat sans qu’il soit besoin qu’elle saisisse au préalable le juge. »
Le Conseil d’Etat confère dès lors un pouvoir important aux personnes publiques quant à la modification voire la résiliation unilatérale de contrats pour cause de stipulations illicites dès lors que la personne publique respecte les principes d’équilibre financier du contrat et de loyauté des relations contractuelles.
Ainsi, dans le cas de l’instance, le juge suprême de l’ordre juridictionnel administratif sanctionne et censure l’ordonnance par laquelle un juge des référés a accédé à la demande de suspension pour cause de doute sérieux sur la légalité d’une délibération ayant pour objet la modification unilatérale d’un contrat concédant un service public pour remédier à son irrégularité.