Faut-il dynamiter la loi Hoguet ? Les agents immobiliers dans le collimateur de l’Autorité de la Concurrence

Dans un avis rendu le 2 juin 2023, l’Autorité de la Concurrence propose de dynamiter purement et simplement la Loi Hoguet en excluant de son champ d’application l’activité d’entremise pour l’achat, la vente et la recherche de biens immobiliers.

« Les conditions d’accès à la profession et les obligations liées au mandat d’entremise immobilière, telles que le principe de la rémunération au résultat, seraient supprimées »

Consciente sans doute de la fronde que ce type de proposition peut susciter, l’Autorité de la Concurrence propose en « option 2 » de réduire la notion d’entremise immobilière à sa plus simple expression, en excluant en particulier l’estimation du bien, la constitution du dossier de vente, la diffusion d’annonces ou mêmes l’organisation des visites, pour ne retenir au final que la sélection des acquéreurs et la négociation.

L’Autorité de la Concurrence estime en effet que l’essor du numérique et l’open data (base de données DVF notamment), l’arrivée sur le marché de nouveaux acteurs tels que les réseaux de mandataires ou encore les « coachs immobiliers », ainsi que les taux de commission globalement plus élevés par rapport à nos voisins européens, justifient d’assouplir les conditions d’exercice de l’activité d’entremise immobilière.

Oui mais…

Pour l’Autorité de la concurrence, la mission d’entremise immobilière se résume aux « prestations » suivantes (p. 31 du rapport) :

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C’est éluder totalement le fait qu’une vente immobilière est devenue, en France du moins, une opération éminemment complexe en regard des multiples contraintes administratives :

  • DPE/ERRIAL ;
  • diagnostic amiante ;
  • diagnostic assainissement ;
  • droits de préemption urbain, rural ou des locaux commerciaux;
  • règles d’urbanisme issues du PLU ;
  • règlementation du changement d’usage dans les villes de plus de 200 000 ;
  • réglementation ERP ou ERT pour les locaux professionnels;
  • diagnostic Carrez, état daté et règlement de copropriété pour les bâtiments soumis à la loi de 1965 ;
  • cahier des charges et/ou règlement de lotissement, etc.
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Or dans ce maquis, il appartient précisément à l’agent immobilier, dans le cadre de son devoir de conseil, de s’assurer de la faisabilité juridique d’une opération et de répondre aux questions de ses mandants ou prospects :

Le terrain est-il « piscinable » ? Puis-je changer la destination de la grange ? Mon terrain est-il divisible pour en vendre une partie comme terrain à bâtir ? Puis-je implanter mon commerce en pied d’immeuble au titre du PLU et du règlement de copropriété ?

Je forme des dizaines d’agents immobiliers tous les ans sur ces problématiques, notamment auprès de la FNAIM.

Je vous garantis que les enjeux liés au devoir de conseil de l’intermédiaire immobilier sont énormes, notamment dans les Métropoles où les règles d’urbanisme sont éminemment complexes (que celui qui parvient à comprendre du premier coup le PLU parisien ou lyonnais me jette la première pierre !).

Dès lors ce dont je suis certain, c’est qu’une « ubérisation » de l’intermédiation immobilière est le dernier service à rendre aux vendeurs et acquéreurs.

Cette analyse vous a été proposée par notre Associé Sébastien Bourillon