Le juge de l’exécution peut modifier ou supprimer une astreinte seulement si l’administration a pris des mesures aux effets équivalents à ceux recherchés par l’ordonnance

Conseil d’Etat, 27 mars 2023, Section française de l’OIP, n°452354

Dans une décision du 27 mars 2023, n°452354, le Conseil d’État s’est prononcé sur les pouvoirs du juge de l’exécution en matière d’astreinte prévus à l’article L.911-7 du CJA.

Il était question dans cette instance de l’exécution d’une ordonnance qui avait enjoint au garde des sceaux d’installer des moustiquaires dans les salles d’enseignement d’une prison, installation à laquelle l’administration n’a pas procédé.
Le Ministère de la Justice alléguait certes de ne pas avoir mis en place ces moustiquaires mais des climatiseurs, estimant que cette mesure limitait le nombre de moustiques.

Le Conseil d’Etat souligne que l’administration ne justifie aucunement que ces mesures produisent des effets équivalents aux mesures contenues dans l’ordonnance et estime dès lors que cette dernière n’a pas été valablement exécutée.

« 5. En ce qui concerne l’injonction d’installer des moustiquaires dans les salles d’enseignement, à laquelle l’administration n’a pas procédé à ce jour, le ministre de la justice fait valoir que les salles d’enseignement ont été équipées d’une climatisation mise en marche un quart d’heure avant le début des cours et fonctionnant durant toute la durée de la classe. Si le ministre allègue de l’efficacité d’une telle mesure pour limiter l’impact des moustiques durant les cours, il n’apporte pas d’éléments établissant que celle-ci a des effets au moins équivalents aux mesures que l’ordonnance du 19 février du juge des référés du tribunal administratif de Nouméa lui a enjoint de mettre en œuvre. Il ne peut, dans ces conditions, être regardé comme ayant en l’espèce pleinement exécuté cette ordonnance.« 

Conseil d’Etat, 27 mars 2023, Section française de l’oip, n°452354
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Absence d’obligation de publicité et de mise en concurrence pour les titres d’occupation sur le domaine privé des collectivités territoriales

Dans une décision du 2 décembre 2022, M. D c/ Commune de Biarritz et Société Socomix, n° 460100, le Conseil d’Etat a précisé que les obligations de publicité et de mise en concurrence du Code général de la propriété des personnes publiques ne s’appliquaient pas aux titres d’occupation délivré par les collectivités territoriales sur leur domaine privé.

En effet, pour la Haute juridiction, « Si l’article 12 de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006, transposé à l’article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) implique des obligations de publicité et mise en concurrence préalablement à la délivrance d’autorisations d’occupation du domaine public permettant l’exercice d’une activité économique, ainsi que l’a jugé la Cour de justice de l’Union européenne par son arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa Srl (C-458/14 et C-67/15), il ne résulte ni des termes de cette directive ni de la jurisprudence de la Cour de justice que de telles obligations s’appliqueraient aux personnes publiques préalablement à la conclusion de baux portant sur des biens appartenant à leur domaine privé, qui ne constituent pas une autorisation pour l’accès à une activité de service ou à son exercice au sens du 6) de l’article 4 de cette même directive. »

Pour parvenir à cette affirmation, les juges du palais Royaldistinguent deux hypothèses :

  • d’une part l’hypothèse dans laquelle la collectivité, en sa qualité d’autorité administrative, délivre une autorisation « pour l’accès à une activité de service ou à son exercice au sens [de la directive « services »] »
  • MISE EN CONCURRENCE NECESSAIRE
  • d’autre part celle dans laquelle la collectivité « se comporte comme un opérateur ou bailleur privé, gérant son domaine privé sans prérogative particulière ». En somme, l’article L. 2122-1-1 du CGPPP doit bien être lu comme ne s’appliquant qu’aux autorisations d’occupation du domaine public.
  • PAS D’OBLIGATION DE MISE EN CONCURRENCE
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Des précisions sur le régime juridique et contentieux des contrats privés de la commande publique

Dans deux arrêts du 11 janvier 2023 (Com. 11 janv. 2023, F-B, n° 21-10.440 et Com. 11 janv. 2023, F-B, n° 20-13.967), la chambre commerciale est venue préciser le régime juridique et contentieux des contrats privés de la commande publique.

La juridiction du quai de l’Horloge a en effet spécifié que le délai de vingt jours dans lequel le juge doit statuer sur un référé précontractuel n’est pas prescrit à peine de nullité.

En effet, la chambre commerciale estime qu’il résulte du I de l’article 1441-1 du code de procédure civile que le juge statue dans un délai de vingt jours sur les demandes qui lui sont présentées en vertu de l’article 2 de l’ordonnance précitée. La chambre commerciale affirme très clairement que ce délai n’est pas prescrit à peine de nullité, signifiant que « son inobservation ne peut pas donner lieu à cassation ».

De plus, la Cour de cassation souligne que le pouvoir adjudicateur doit bien respecter les modalités de publicité et de mise en concurrence lors de la notification du rejet d’une offre

Elle rappelle que l’article R. 2181-1 du code de la commande publique est bien applicable aux marchés privés de la commande publique. Cet article prévoit que « l’acheteur notifie sans délai à chaque candidat ou soumissionnaire concerné sa décision de rejeter sa candidature ou son offre ». Le premier alinéa de l’article R. 2181-3 du même code précise que « la notification prévue à l’article R. 2181-1 mentionne les motifs du rejet de la candidature ou de l’offre ».

Enfin, la chambre commerciale de la Cour de cassation a dégagé du CCAP applicable en l’espèce  que « les sociétés titulaires des marchés sont tenues d’informer le pouvoir adjudicateur, en vue de l’organisation de la consultation pour le marché de renouvellement, sur “les données relatives aux personnels permanents employés à l’exécution des prestations du […] marché” et que cette information devait comprendre “au minimum l’état quantitatif et qualitatif des personnels et masses salariales correspondantes” ».

Ainsi, constitue une faute au sens de l’article 1240 du Code civil, le titulaire d’un marché privé de la commande publique qui ne justifie pas lors d’un appel d’offres en vue de son renouvellement des contrats de travail liés à la réalisation de ce marché doivent être repris par l’attributaire et qui ne communique pas une information « essentielle à l’élaboration de leurs offres par les candidats et qu’il est seul à connaître ».

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Un mémoire en réclamation est exigé même dans le cadre d’une résiliation pour ordre de service tardif

Dans une décision du 29 décembre 2022, Grand port maritime de Marseille, le Conseil d’Etat est venu préciser l’exigence d’un mémoire en réclamation préalable avant toute résiliation pour ordre de service tardif.

En effet, selon les juges du Palais Royal, « il résulte de l’article 50.1.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG Travaux), dans sa rédaction approuvée par l’arrêté du 3 mars 2014 modifiant l’arrêté du 8 septembre 2009, que, lorsqu’intervient, au cours de l’exécution d’un marché, un différend entre le titulaire et l’acheteur, résultant d’une prise de position écrite, explicite et non équivoque émanant de ce dernier et faisant apparaître le désaccord, le titulaire doit présenter, dans le délai qu’elles prescrivent, un mémoire en réclamation, à peine d’irrecevabilité de la saisine du juge du contrat. »

De plus, « il ne résulte pas de l’article 46.2.1 de ce même CCAG Travaux que le titulaire du marché, s’il entend être indemnisé sur le fondement de ces stipulations et qu’un différend intervient à ce propos à la suite de sa demande écrite dûment justifiée, soit dispensé de présenter un mémoire en réclamation répondant aux conditions prévues à l’article 50.1.1 du CCAG Travaux avant de saisir le juge. »

Ainsi, la circonstance qu’une demande écrite dûment justifiée doit être formulée par le titulaire en cas de résiliation pour ordre de service tardif ne le dispense pas de présenter un mémoire en réclamation en cas de différend relatif à cette demande avec l’acheteur.

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Des précisions sur le contrôle analogue pour les contrats « in house »

Sur renvoi préjudiciel, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), a statué sur une définition plus précise du contrôle analogue en matière de contrats en quasi-régie ou in house.

En effet, il faut rappeler que dans le cadre d’un contrat de quasi-régie, il existe un critère selon lequel le pouvoir adjudicateur exerce un contrôle conjoint avec d’autres pouvoirs adjudicateurs sur une personne morale mais surtout analogue à celui qu’ils exercent sur ses propres services.

Ce critère est posé à l’article L. 2511-1 du code de la commande publique (CCP).

La décision de la CJUE vient préciser que ce critère ne saurait être rempli au seul motif que siège au conseil d’administration de cette personne morale le représentant d’un autre pouvoir adjudicateur qui fait également partie du conseil d’administration du premier pouvoir adjudicateur.

En l’espèce, il était question pour la Cour de déterminer si le critère du contrôle conjoint d’une personne morale, à qui le marché public est attribué par plusieurs pouvoirs adjudicateurs, était satisfait lorsque siège au conseil d’administration d’une personne morale le représentant d’un autre pouvoir adjudicateur qui fait également partie du conseil d’administration du premier pouvoir adjudicateur.

Pour ce qui est du contrôle conjoint, La Cour de Justice s’est basée sur la directive 2014/24/UE relative à la passation des marchés publics qui précise que « les organes décisionnels de la personne morale contrôlée doivent être composés de représentants de tous les pouvoirs adjudicateurs participants, une même personne pouvant représenter plusieurs pouvoirs adjudicateurs participants ou l’ensemble d’entre eux. ».

Il résulte de cela, selon la Cour, qu’un pouvoir adjudicateur qui exerce un contrôle conjoint sur une personne morale doit dans ce cas disposer « d’un membre agissant en qualité de représentant de ce pouvoir adjudicateur dans les organes décisionnels de cette personne morale, ce membre pouvant, le cas échéant, représenter également d’autres pouvoirs adjudicateurs ».

En ce qui concerne plus précisément le contrôle analogue, la Cour estime que ce critère est rempli lorsqu’une personne morale est contrôlée par une autre personne morale, elle-même contrôlée par le pouvoir adjudicateur mais également lorsqu’une personne morale contrôlée attribue en qualité de pouvoir adjudicateur un marché au pouvoir adjudicateur qui la contrôle, ou alors à une autre personne morale contrôlée par le même pouvoir.

Toutefois, ce critère n’est pas rempli lorsqu’un membre de ces organes y siège uniquement « en qualité de représentant d’un autre pouvoir adjudicateur ». En effet, selon le raisonnement retenu par la Cour, les pouvoirs adjudicateurs concernés doivent pouvoir exercer de manière conjointe « une influence décisive sur les objectifs stratégiques poursuivis par la personne morale contrôlée et sur les décisions importantes que celle-ci est susceptible de prendre ».

Ainsi, le critère du contrôle conjoint analogue n’est pas rempli du seul fait que siège au conseil d’administration de cette personne morale le représentant d’un autre pouvoir adjudicateur qui fait également partie du conseil d’administration du premier pouvoir adjudicateur.

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Indemnité de fin de contrat même en cas de faute de l’agent commercial

Dans un très important arrêt « SBA » du 16 novembre 2022, n°21-10.126, la chambre commerciale de la Cour de cassation est venue préciser les modalités de fin de contrat en cas de faute entre un agent commercial et un mandant : elle est venue affirmer tout d’abord la nécessité d’une appréciation in concreto avant d’établir les modalités d’indemnisation pour l’agent en fin de contrat.

Sur la résiliation du contrat pour faute du mandant

L’arrêt en question est venu réaffirmer ce qui peu apparaitre comme une évidence : l’agent peut bien rompre le contrat en cas de faute du mandant. L’arrêt illustre bien les différentes fautes qui peuvent conduire à une telle rupture du contrat :

  • Lorsque le mandant refuse de transmettre des informations nécessaires au calcul des commissions de l’agent ;
  • Lorsque le mandant commercialise des produits confiés à l’agent ;

Néanmoins, à cet égard, il convient de souligner que le raisonnement de la Cour tend vers une appréciation in concreto de la faute du mandant : ce dernier n’est pas toujours fautif lorsqu’il commercialise des produits confiés à l’agent.

La décision est en revanche peu claire sur l’établissement d’un critère permettant de déterminer s’il y a faute du mandant : un arrêt de la CA de Paris évoque « une atteinte aux conditions d’exercice par [l’agent] de son mandat » et une « attitude déloyale [du mandant] qui prend des engagements vis-à-vis de son mandataire et ne les respecte pas » (Paris, pôle 5 – ch. 5, 5 nov. 2020, n° 18/01041, préc.).

Dès lors, il apparait pertinent dans ce contexte d’encadrer contractuellement la commercialisation des produits par le mandant, notamment en ligne, afin d’éviter toute difficulté par la suite.

Sur l’indemnité de fin de contrat

L’arrêt a également un autre apport important puisqu’il vient compléter un revirement de jurisprudence effectué dans l’arrêt Acopal du même jour qui détermine que pour retirer tout droit à indemnité de fin de contrat, il est nécessaire de remplir deux conditions :

  • le mandant doit être à l’initiative de la rupture ;
  • la faute grave doit être mentionnée dès le courrier de rupture. Voilà la seule situation où la faute grave prive l’agent de son indemnité.

Dès lors, dans le présent arrêt, la chambre commerciale adopte la solution complémentaire : lorsque l’agent est à l’initiative de la rupture, l’indemnité de fin de contrat lui est acquise, « quand bien même celui-ci aurait commis une faute grave dans l’exécution du contrat » (arrêt, § 5).

  • Absence d’effet de la faute grave non dénoncée sur le principe de l’indemnité.

Ainsi, le principe devient celui de l’absence d’effet de la faute grave non dénoncée sur le principe d’indemnité. Toutefois, bien évidemment, il pourra y avoir une réduction du montant de l’indemnité via la faute grave non dénoncée. 

  • Calcul de l’indemnité de fin de contrat : les commissions perçues pour les opérations postérieures à la rupture sont à intégrer

En pratique, il est fréquent que des contrats, liés à l’activité de l’agent, soient conclus peu de temps après la fin du contrat d’agence commerciale. Dans une telle situation, l’agent a droit au paiement de ces commissions « post-contractuelles » (C. com., art. L. 134-7).

  • Influence des commissions postcontractuelles sur l’indemnité de fin de contrat. Les commissions perçues par l’agent ont une influence sur l’indemnité de fin de contrat : elles permettent d’en calculer le montant. L’indemnité est généralement égale à deux années de commissions perçues par l’agent, calculées sur la moyenne des deux ou trois dernières années du contrat. Cette règle connaît des tempéraments, voire des exceptions, mais elle demeure un guide souvent adopté.

L’arrêt SBA apporte une précision importante et favorable aux agents : les commissions postcontractuelles doivent intégrer l’assiette de calcul de l’indemnité de fin de contrat.

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Bons de commande : inutilité du prix unitaire et nécessité du respect du contradictoire

Dans un arrêt rendu le 11 janvier, n°21-14.032, la première chambre civile de la Cour de cassation a réaffirmé sa jurisprudence constante sur l’inutilité d’un prix unitaire dans un bon de commande lors d’un démarchage à domicile. Elle a par ailleurs souligné sur la nécessité du respect du contradictoire d’un moyen soulevé d’office relatif au bordereau de rétractation.

  • Pas d’obligation de prix unitaire sur les bons de commande, le prix global suffit

Dans l’arrêt susmentionné, la Cour de cassation a cassé un arrêt de Cour d’appel qui listait les différents éléments que devait comprendre un bon de commande : elle relève que la législation d’exception en droit de la consommation fait peser suffisamment de lourdeur sur les contrats conclus pour ne pas compliquer plus encore ceux-ci de conditions non prévues par la loi.

Ainsi, il n’appartenait pas au juge d’ajouter des termes aux bons de commande mais cela revient uniquement au Législateur.

  • Nécessité du contradictoire pour un moyen soulevé d’office relatif au bordereau de rétractation

Dans l’arrêt attaqué devant la Cour de cassation, les juges d’appel avaient soulevé d’office l’irrégularité du bordereau de rétractation et annulé les contrats notamment sur ce motif.

La première chambre civile a cassé cette décision en soulignant que la Cour d’appel n’avait pas respecté le contradictoire en l’espèce. Elle a donc renvoyé à une autre Cour le soin d’établir si ce bordereau était effectivement irrégulier.

La décision implique un respect des textes, seul garant d’une certaine sécurité juridique dans une matière aussi technique que subtile.

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Les réparations du tiers ne libèrent pas le vendeur de la garantie des vices cachés

Dans un arrêt du 8 février 2023, n°22-10.743, la 3e chambre civile de la Cour de cassation a affirmé que la réparation par un tiers du vice caché affectant la chose vendue n’a pas d’incidence sur les rapports contractuels entre vendeur et acquéreur et ne supprime donc pas l’action estimatoire de l’acquéreur.

En l’espèce, il s’agissait de défauts importants dans l’appartement vendu qui résultaient des désordres causés par le manque d’entretien des parties communes de l’immeuble. Le syndic de copropriété, à l’origine donc des troubles, mais tiers à la vente de l’appartement, est intervenu pour réparer les vices cachés.

Le vice ayant disparu, les juges d’appel avaient estimé que l’acquéreur lésé ne pouvait dès lors plus user de l’action estimatoire, et que finalement le syndic avait agi en tant que tiers intéressé qui agissait en garantie du vendeur.

Mais la Cour de cassation a cassé partiellement la décision d’appel en estimant que si la réparation par le tiers intéressé avait éteint la possibilité d’action en réparation, elle n’avait cependant pas éteint l’action estimatoire contre le vendeur.

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L’assurance dommages-ouvrage comprend les mesures conservatoires mais également les réparations efficaces

Dans une décision du 14 décembre 2022, Sté Aesio Santé Méditerranée c. Sté Gan Assurances, la 3e chambre civile de la Cour de cassation s’est prononcée sur les garanties comprises dans l’assurance dommages-ouvrage. Elle estime que cette dernière ne garantit les mesures conservatoires que si elles sont nécessaires à la non-aggravation des désordres, mais elle donne lieu à garantie si les travaux qu’elle a financés n’ont pas permis de mettre fin aux désordres.

Il s’agissait en l’occurrence de l’exploitant d’une clinique qui assignait son assureur dommages-ouvrage afin d’obtenir sa garantie face aux nombreux dysfonctionnements du système de sécurité incendie. La cour d’appel avait accédé à certaines des demandes du maitre d’ouvrage qui s’est toutefois pourvu en cassation.

Ce pourvoi a été l’occasion pour la 3e chambre civile de rappeler que l’assurance dommages-ouvrage doit prendre en compte l’ensemble des mesures conservatoires nécessaires à la non-aggravation des dommages dans l’attente d’une réparation efficace.

En l’espèce, la Cour de cassation a considéré que le maintien d’un service de surveillance permanente ne pouvait être légitimement considéré comme une mesure conservatoire puisqu’il ne s’agit pas en l’occurrence de protéger l’ouvrage mais de permettre la poursuite des activités dans l’établissement.

Enfin, la plus haute juridiction judiciaire retient que l’assureur n’avait pas rempli l’intégralité de ses obligations puisqu’il n’avait pas suffisamment préfinancé les travaux nécessaires à une réparation efficace, puisque deux précédentes déclarations de sinistre n’avaient pas permis de mettre fin aux désordres.

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La mise en œuvre de l’assurance dommages-ouvrages avant réception illustrée

Dans une décision du 7 septembre 2022, Sté Primo Levi c. Sté MAF, la 3e chambre civile de la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser les conditions de mise en œuvre de l’assurance dommages-ouvrage avant la réception.

En l’espèce, il s’agissait d’un maitre d’ouvrage qui, se plaignant de nombreux désordres avant la réception, a résilié le marché conclu avec l’entreprise et a demandé la garantie de l’assureur dommages-ouvrage, ce qui lui a été refusé car il n’avait pas réalisé de mise en demeure préalable. L’entreprise en cause a été placée en liquidation judiciaire quelques mois après.

Il met dès lors en cause le maître d’œuvre qui aurait dû, selon lui, mettre en demeure l’entreprise avant la résiliation. Il estime en effet que ce dernier pouvait bel et bien faire une telle mise en demeure sans mandat particulier de sa part et que de toute manière cette mise en demeure n’était pas nécessaire puisque ladite entreprise avait été placée en liquidation judiciaire.

La Cour de cassation a rejeté entièrement son pourvoi, réaffirmant la nécessité d’une mise en demeure préalable à toute mise en œuvre de l’assurance dommages-ouvrage avant la réception.

De plus, la mise en demeure ne peut être faite que par le maitre d’ouvrage ou son mandataire, or, dans le cas d’espèce, le maitre d’œuvre n’avait reçu aucun mandat en ce sens.

Enfin, la 3e chambre civile souligne que la mise en demeure préalable n’est plus nécessaire dans le seul cas où la cessation d’activité ou le placement judiciaire interviendrait avant toute résiliation du contrat, ce qui n’était pas le cas dans la présente instance.

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